Samuel Franklin Cody
La traversée de la Manche par Cody
rapportée par le quotidien "Le Phare de Calais"
:
1er Novembre 1903
Le détroit en bateau cerf-volant
Le capitaine américain Cody qui a projeté de
traverser le détroit dans une embarcation remorquée
par un cerf-volant est arrivé hier matin à Calais.
Il compte réussir plus facilement dans son entreprise
en partant de Calais avec des vents d'entre nord-est et sud-est.
Le bateau du capitaine Cody a 2m, 50 sur 0m, 90. Il a deux
mâts auxquels est attachée la remorque du cerf-volant
manuvré au moyen de cordages.
Le 4 novembre 1903
Le bateau cerf-volant
Le capitaine Cody, voulant se rendre compte des chances qu'il
aurait pu trouver pour réussir dans son projet de traversée
en bateau cerf-volant, en partant de Boulogne, s'est rendu
dans cette ville, mais il est revenu à Calais jugeant
préférable de partir de la plage du Casino,
au premier vent favorable.
Cet après-midi, de 2 à 3h, le capitaine Cody
a lancé son cerf-volant qui a plané à
une très grande hauteur au-dessus de la place d'Armes.
De nombreuses personnes ont contemplé la forme originale
de cette grosse machine volante.
Le 7 novembre 1903
La traversée en bateau cerf-volant
L'inventeur S.-F. Cody, qui devait tenter la traversée
du détroit dans une légère embarcation
remorquée par un cerf-volant, se proposait de mettre
sa tentative à exécution, hier, lundi, mais
par suite de la tempête, il dut ajourner l'exécution
de son projet jusqu'à ce que le temps soit redevenu
plus favorable.
Le 8 novembre 1903
La traversée en bateau cerf-volant.
Le capitaine Cody, qui avait été rencontré
avant-hier, au large, par le paquebot "Empress",
regagnant la côte anglaise à la traîne
du bateau de pêche "Diana", chargé
de l'escorter, est rentré, hier, à Calais, par
la malle de midi et demie.
Le capitaine Cody avait avec lui son canot et ses cerfs-volants,
au nombre de deux, qui démontés avec leurs toiles
roulées autour des bambous qui en forment l'armature,
ne tiennent pas plus de place que les engins qu'un pêcheur
à la ligne emporte sur l'épaule ou sous son
bras.
L'intrépide inventeur s'est rendu dans l'après-midi
au musoir du quai de marée et a lancé le plus
grand de ses cerfs-volants qui, jusquà la chute
du jour, a plané au-dessus de la rade en face du casino.
Vers 4 heures, le capitaine Cody a essayé son deuxième
cerf-volant.
Le vent était assez favorable et soufflait avec une
certaine force de l'est. Le capitaine avait l'intention de
partir, dans la soirée, à l'heure de la basse
mer, afin d'utiliser le courant de la marée montante,
portant comme l'on sait du Gris-Nez vers Waldan et combiner
l'effort de traction exercé par ses cerfs-volants avec
la déviation du courant.
L'inventeur comptait ainsi pouvoir faire route vers la côte
anglaise et atterrir soit à Douvres, soit à
Folkestone, soit sur un point intermédiaire de la côte.
A 11 heures du soir, le vent continuant à être
favorable, le capitaine Cody a jugé le moment venu
de partir et il mis son canot à la mer.
Peu après le frêle esquif sortait du port et
prenait la direction de Douvres à la traîne du
cerf-volant.
Le 10 novembre 1903
La réussite du capitaine Cody
Le capitaine Cody parti de Calais vendredi soir à 8
heures, dans son bateau cerf-volant a réussi dans son
entreprise. Il est arrivé à Douvres à
9 heures du matin, samedi.
M. Cody dit que son succès établit la possibilité
de l'application des cerfs-volants à la navigation
et démontre qu'ils pourront être utilement employés
dans la marine marchande et dans la marine de guerre. Au cours
de son voyage, il a rencontré plusieurs navires qui
ont failli le faire sombrer.
Le navigateur était fatigué de sa traversée
car la nuit avait été froide et il n'avait rien
pu boire de chaud, ses provisions consistant purement en mortadelle,
chocolat, pommes, bière, eau et alcool de menthe.
Une foule nombreuse assistait au débarquement de M.
Cody et lui a fait une ovation.
Extrait de "La Vie
Illustrée" du 20 novembre 1903 :
La
Vie Sportive
Nous avons eu une semaine fort chargée au point de
vue des manifestations sportives aériennes.C'est tout
d'abord le colonel Cody qui utilise la force de traction d'un
immense cerf-volant pour remorquer, à travers la Manche,
un canot dans lequel il a pris place. Le voyage s'est heureusement
effectué. Après plusieurs tentatives infructueuses,
le capitaine a enfin trouvé le vent favorable et a
pu atteindre la côte opposée. Que ressortira-t-il
de pratique de cette application originale du cerf volant
au remorquage? Il y a là pour les compagnies de navigation,
toujours à la recherche de l'économie de frais
de transport une idée à creuser et certes des
rades importantes telle celle de Brest, ne manqueraient pas
d'un certain cachet pittoresque si tous les chalands s'en
allaient traînés par des cerfs-volants. Dans
tous les cas, et quel que soit le résultat poursuivi,
le colonel Cody a fait preuve d'originalité, de persévérance
et de courage.
Extrait de LA VIE AU GRAND
AIR, N ° 271, du 19 novembre 1903.
De Calais à Douvres à
la remorque d'un cerf-volant
On a traversé la Manche de bien des façons,
en canot, à la nage, en ballon. Voici une nouvelle
manière, qui consiste à s'attacher à
la queue d'un cerf-volant. C'est le fameux "capitaine
Cody ", l'ex-roi des Cow-boys, qui est l'inventeur de
ce procédé pittoresque.
Le bateau employé par le roi des Cow-boys
pour sa tentative mesure environ 4 mètres de longueur,
1m. 50 de largeur. Jamais, probablement, une barque aussi
légère ne traversa la Manche. Elle est couverte
de toile de manière que l'eau ne puisse entrer, et
a un trou au milieu assez grand pour permettre à Cody
de s'y introduire.
Les cerfs-volants sont construits en soie japonaise ou en
satin. Le plus grand mesure plus de 5 mètres de largeur.
Même quand il n'y a pas beaucoup de vent, la force est
telle qu'il faut deux hommes pour le retenir. Le cerf-volant
monte avec une facilité étonnante, si facilement
même qu'on doit mettre un pied sur le châssis
pendant qu'on fait les préparations pour éviter
qu'il ne monte trop tôt.
Quelquefois, Cody attache deux cerfs-volants au bateau, mais
quand il traversa la Manche, il n'en avait qu'un, l'aéroplane
"Old Faithful" (Vieux Fidèle), un cerf-volant
spécialement fait pour peu de vent.
Cody, qui, pendant trois jours avant son départ, avait
voyagé et n'avait jamais trouvé le vent assez
fort ou la direction juste, réussit à partir
de Calais le vendredi soir. C'était curieux de voir
le bateau partir du port, et quoique le vent vînt de
côté, il marchait tout droit. Cody était
seul. D'abord le journal anglais le Daily Mail avait engagé
un bateau de pêche sur lequel son représentant
et celui de la Vie au Grand Air ont assisté Cody dans
tous ses essais, mais le vent n'étant pas suffisant,
le bateau quittait le port le jour précédant
le départ, et Cody resta seul.
A 7 heures et demie du soir, le départ eut lieu. Le
petit canot, nommé Lela. d'après le nom de sa
femme, se mit à, suivre les vagues, lentement entraîné
d'abord par le cerf-volant, et accompagné, durant le
mille initial, par un bateau-pilote français.
La vitesse fut tout d'abord remarquable et le premier mille
fut parcouru en 14 minutes. Le bateau-pilote, avec ses six
rameurs, ne put suivre le train. Le temps était alors
superbe.
Assis à l'arrière, Cody maintenait la barre,
se dirigeant à l'aide d'un compas éclairé
car une lanterne sourde.
A peu près à moitié chemin,
le vent, soudain, tomba. L'aéroplane avait peine à
se maintenir dans l'air. Le reflux aidant, le canot fut même
entraîné dans une direction nettement contraire.
Afin d'éviter que le Vieux Fidèle ne tombât
dans la mer, il fallut le rentrer, ce qui ne fut pas chose
facile, l'engin étant plus grand que le bateau.
Cependant, la marée changea. Le bateau se mit à
flotter à la dérive, mais, peu à peu,
le vent fraîchit et, avec des précautions infinies,
Cody put, de nouveau, lancer son cerf-volant.
Enfin, la ville de Douvres fut en vue, mais, juste à
l'entrée du port, le vent tomba encore et l'aéroplane
redescendit. Mais le voyage était terminé et
quelques minutes après, à 8h.3O du matin, le
capitaine Cody atterrit au ponton de l'amirauté.
A. P. K.
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